Streaming

J’étais très anti-Spotify l’an passé. Je vais tenter de m’expliquer pourquoi je ne le suis plus.

Je pense que la musique n’a de valeur que si elle remplit une fonction dans la vie des gens.

Fonction au sens très large, pas seulement une fonction de divertissement, par exemple, une fonction méditative, spirituelle, d’émerveillement, de découverte, de rassemblement, une raison de mettre la musique.

En rétrospective, je trouve prétentieux de dire : «ma musique a trop de valeur pour être distribuée gratuitement sur les plateformes», alors que je suis un embryon d’artiste qui commence à peine à s’articuler un langage, un concept, une vibe.

Je dis pas que ma musique n’a pas de valeur, elle a un potentiel de valeur, mais elle n’a de la valeur que dans la mesure où elle sert à quelqu’un à quelque part.

Ça sonne mercantile mais en fait c’est exactement l’inverse : c’est précisément parce que je ne veux pas être dans un rapport transactionnel avec mon public que je tiens à ce que ma musique soit disponible gratuitement partout.

«L’industrie de la musique» comme on la connait aura duré un siècle, entre le premier phonographe et l’arrivée de Napster, et pendant cette période de temps elle aura fait ben de l’argent sur le dos de ben des créatifs en les rémunérant rarement à juste titre.

Quand à moi la musique est entrée dans une nouvelle ère, où elle délaisse le modèle transactionnel pour faire place à une logique de gift economy, où l’auditeur.trice a accès à la musique, mais peut décider d’encourager l’artiste, non pas par obligation morale, mais juste par amour et désir de collaborer au projet.

L’avantage c’est que c’est l’artiste qui est au contrôle de son Bandcamp et de son Patreon.

C’est pas tout le monde qui est rendu là, for sure, et d’après moi les artistes s’y rendent avant la masse, mais il y a une partie de moi qui est réconfortée d’être revenue à une espèce d’âge des troubadours où tu te plantes sur la place publique avec ta lyre et ton chapeau pour donner librement l’art, peu importe le cadeau que tu reçois.

Un vrai artiste crée comme il sue de toute façon. Si tu ajoutes de la valeur à la communauté, la communauté va prendre soin de toi. It’s an abundant world after all.